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Un artisan boulanger nous explique comment bien choisir notre pain

Un artisan boulanger nous explique comment bien choisir notre pain

Bien choisir son pain est une question fatidique, à l’heure où le sans gluten est un en enjeu marketing, et si on revenait à la base: le pain au levain?

 

Par la rédaction

Quelles sont les différents types de farines ?

Un grain de blé est constitué d’une amande, d’un germe et de son. Les meuniers écrasent le blé de deux manières différentes et par extension donnant une qualité différente à la farine. Ils peuvent utiliser des cylindres ou bien la meule de pierre. Pour ma part, je privilégie la farine écrasée sur meule de pierre qui semble moins chauffée à l’écrasement et donc moins de perte de nutriments. Une fois le grain écrasé, le meunier va tamiser la farine. Ainsi suivant la maille du tamis il restera plus ou moins de son et de germe dans la farine finale. C’est cette étape qui va définir le type de mouture, le meunier classe alors ses farines de blé de T150 à T55 ( ce taux peut être plus élevé avec d’autres espèces de céréales) . Le T indique le Taux de cendre. C’est à dire que sur 100g de farine brûlée, on mesure le pourcentage de cendre restante qui correspond aux minéraux qui ne se sont pas consumés. Il existe une corrélation entre la quantité de minéraux et la quantité de fibre. Par conséquence , plus le taux de cendre est élevé plus la quantité de fibre du son est élevée. Les variétés de blé jouent aussi un rôle dans la qualité d’une farine, information plus difficile à avoir, les meuniers effectuant des assemblages de variétés et ne communiquant pas trop sur ce point. En boulangerie classique, le pain est fait avec une farine T65 qui donne une mie plus claire qui correspond à une demande la clientèle et des habitudes culturelles. Il me semble aujourd’hui que nous devrions oser passer à des farines plus riche comme T80 voir T110 et abandonner les farines trop raffinées. Mais par usage et par facilité à la panification ces farines perdurent.

 

Le choix de pain issu de farine ayant le plus de fibre semble être meilleur pour la santé et avec un meilleur rapport valeur nutritionnelle/prix d’achat. Pour ma part je travaille principalement avec une farine T80 et T110 en bio (les intrants chimiques se retrouvent dans le son, alors mieux vaut éviter la farine complète issue d’une agriculture « conventionnelle ») . Pour répondre à une demande de la clientèle en pain avec de la farine blanche T65, j’utilise des recettes de pâtes inspirées de Christian Rémésy, chercheur retraité de l’ INRAE( dans son libre « sauvons le pain » editions thierry souccar), avec par exemple une baguette T65 enrichi avec 10% de farine de légumineuses (riche en protéines).

 

Quelles sont les différentes méthodes de fabrication du pain?

La méthode de panification joue aussi un rôle dans la valeur nutritionnelle du pain. Je ne vais pas faire une comparaison entre les pratiques, mais plutôt expliquer comment je travaille et quels sont les avantages pour consommateur. Je pratique ce qu’il est d’usage d’appeler la « fermentation longue ». La base de cette pratique est de travailler en premier lieu avec du levain et non avec une levure sélectionnée « saccharomyce cerevisiae ». Le levain, mélange de bactérie lactique, acétique et levures sauvages, est incorporé en petite quantité ( 1% de la masse de la farine), au lieu d’environ 20% dans une recette classique au levain. L’objectif d’un pourcentage faible est d’avoir une activité fermentaire plus longue à température ambiante ( moins consommatrice d’énergie, pas de chambre froid). Lors de la fermentation (fermentation lactique) le pH de la pâte va baisser ( pH acide env 4), cette acidification de la pâte va à son tour accélérer un travail enzymatique ( enzyme = molécule spécialisée dans une action précise). Cette matrice enzymatique créée, les éléments de la pâte vont commencer à être digérés (gluten , acide pythique..). Il est de notoriété que la fermentation lactique apporte à notre nourriture davantage de goût qu’une fermentation aux levures et permet aussi au produit d’avoir une conservation plus longue ( principe des produit lacto-fermenté).

 

 

Pourquoi le gluten a mauvaise presse?

En utilisant des céréales comme matière première dans la panification la question du gluten se pose à nous. Pour rappel, le gluten (ensemble de protéines ) est un constituant naturel. En ce qui concerne le gluten, nous sommes équipés pour le digérer, grâce à notre microbiote qui procède l’outil indispensable pour découper cette chaîne complexe, les enzymes. Reste la question de la quantité de gluten que nous sommes capables de dégrader. La sélection agronomique des céréales c’est focalisée sur le taux de protéine et le rendement, par conséquence la quantité élevée de gluten dans la préparation des pâtes ( qui correspondrait à une demande des industriels du pain et aux pratiques de la boulangerie mécanisée). Pour ma part, la pratique de fermentation longue à température ambiante (environ 18°C) permet d’activité la prédigestion des chaînes de gluten. Il me semble qu’il n’est pas à l’ordre du jour d’orienter la sélection vers plus de valeur nutritionnel des céréales. En conclusion, le gluten peut être une source de problème pour certain consommateur, en réponse l’artisan devra revoir sa pratique de panification afin de faciliter l’assimilation de celui-ci. D’autre part, il n’y pas que le gluten sur lequel le consommateur devrait s ‘interroger, d’autres éléments naturels sont aussi une source de problème comme l’acide phytique, les teneurs en sel.

 

Comment choisir son pain?

Il me semble qu’une première démarche pour choisir son pain et d’interroger son boulanger sur la provenance de sa farine . Pourquoi ? Et bien une partie des professionnels utilise des farines avec des « améliorants technologiques » ( plus ou moins issu de produits naturels), par conséquence choisir une farine sans améliorant peut-être un premier critères de sélection de son boulanger. Dans la même dynamique, on peut questionner aussi l’origine du sel (marin étant le plus intéressant« nutritionnellment » et écologiquement), sur la pratique de panification ( au levain ,à la levure, les deux, fermentation courte ou longue, passage au froid….).  Ville ou campagne ? Pour ma par , il n’y a pas de différences entre une métropole ou une commune de 100 habitants, l’important est de comprendre et connaître la pratique de l’artisan. Avec ce constat, il paraît difficile pour une grande surface de faire du pain à haute valeur nutritionnelle et le choix d’une boulangerie à échelle humaine semble être un premier gage de pain bon pour la santé et pour notre environnement. Ce dernier point devrait être aussi un critère dans le choix de notre alimentation, c’est un concept qu’aborde Christian Rémésy dans ses publications et qu’il a défini sous le terme de « nutriécologie ».